INDE : Pollution

Contre la pollution à New Delhi, l'espoir pourrait venir de l'eau



 - Les autorités indiennes vont pulvériser de l'eau contre le nuage toxique qui recouvre la capitale indienne depuis une semaine. Respirer l'air de la ville équivaudrait à fumer 44 cigarettes par jour.
Pour lutter contre le smog toxique dans lequel New Delhi suffoque depuis une semaine, les autorités ont annoncé vendredi qu'elles prévoient de pulvériser de l'eau sur la capitale. «La pulvérisation d'eau est le seul moyen de réduire ces dangereux niveaux de pollution», a déclaré Shruti Bhardwaj, une responsable de l'environnement chargée de la surveillance de la qualité de l'air. Le gouvernement est en train de finaliser son plan pour assainir l'air et compte arroser la ville depuis 100 mètres de haut, a t-il déclaré, sans préciser si la surface totale de l'agglomération, qui compte 22 millions d'habitants, bénéficiera ou non de cette méthode d'assainissement. Des camions de pompiers seront mobilisés pour cette opération, a précisé un responsable du ministère de l'Environnement. Un autre fonctionnaire de ce ministère a indiqué, sous le couvert de l'anonymat, que des canons à eau - d'ordinaire utilisés par la police contre des émeutiers - seraient également utilisés.


Anumita Roychowdhury, directrice exécutive du Centre pour la Science et l'Environnement à New Delhi, a indiqué qu'arroser la ville aidera à faire disparaître le smog, mais que cela ne résoudra pas le problème pour autant. «Chaque mesure de contrôle de la poussière doit être mise en place pour assurer que la qualité de l'air s'améliore le plus tôt possible», a-t-elle déclaré. De son côté, Satyendra Kumar Jain, ministre de la Santé de New Delhi, souligne que les travailleurs qui vivent dans les bidonvilles ou sous les survols routiers sont ceux qui souffrent le plus, les habitants aisés pouvant accéder à des purificateurs d'airs et des masques de filtration. Le ministre a déclaré que les hôpitaux publics de la ville traitent actuellement des milliers de patients souffrant de troubles respiratoires. «La seule solution qui reste est de commencer à pulvériser de l'eau directement au niveau de la rue, en particulier le long des routes à forte circulation», a t-il confirmé. Les médecins de l'Institut gouvernemental Vallabhbhai Patel Chest affirment que le nombre de patients a plus que triplé depuis que les niveaux de pollution ont augmenté cette semaine.

Un médecin indien traite une patiente souffrant de problèmes respiratoires à l'aide d'un nébuliseur, le 10 novembre dernier à l'hôpital de Sri Ganga Ram, à New Delhi.
Un médecin indien traite une patiente souffrant de problèmes respiratoires à l'aide d'un nébuliseur, le 10 novembre dernier à l'hôpital de Sri Ganga Ram, à New Delhi. MONEY SHARMA/AFP
Ce plan d'action s'inscrit dans une série de mesures préventives, mises en place par le gouvernement cette semaine. Tous les établissements scolaires ont été fermés mardi pour le reste de la semaine afin de protéger les poumons des élèves. «En raison de la détérioration de la qualité de l'air à Delhi, il ne peut y avoir de compromis avec la santé des enfants. Nous avons ordonné la fermeture de toutes les écoles de Delhi jusqu'à dimanche», a ainsi annoncé Manish Sisodia, vice-ministre en chef de la région de Delhi. De même, les chantiers de construction ont été suspendus, les déplacements en véhicules restreints et le prix du parking multiplié par quatre pour amener les gens à utiliser les transports publics. Les camions ont interdiction de pénétrer dans la capitale, et le ministère en charge des transports a précisé qu'il allait réintroduire un régime de circulation «pair-impair». La Haute Cour de Delhi a suggéré jeudi que le gouvernement mette en place «l'ensemencement des nuages» pour provoquer artificiellement des précipitations, une pratique également utilisée à Pékin.

Des étudiantes indiennes se couvrent la bouche pour ne pas respirer le smog épais, le 8 novembre dernier. Depuis mardi, l'ensemble des établissements scolaires ont été fermés pour protéger les poumons des enfants.
Des étudiantes indiennes se couvrent la bouche pour ne pas respirer le smog épais, le 8 novembre dernier. Depuis mardi, l'ensemble des établissements scolaires ont été fermés pour protéger les poumons des enfants. SAJJAD HUSSAIN/AFP
Les épisodes de «smog» sont récurrents en automne et hiver à New Delhi, que l'OMS avait classée en 2014 comme ville la plus polluée au monde. Le froid et l'absence de vent plaquent au sol les émissions polluantes des véhicules, usines et centrales, les empêchant de se dissiper. Ces particules en suspension accentuent les risques de maladies cardiovasculaires et de cancer des poumons. Les plus petites d'entre elles (PM2,5), grandes comme un trentième d'un diamètre de cheveu humain, parviennent à travers les poumons à s'infiltrer dans l'organisme et le sang. D'après la chaîne d'information CNN, qui cite le groupe de recherche scientifique Berkeley Earth, respirer l'air de New Delhi équivaudrait à fumer 44 cigarettes par jour. Ces derniers jours, l'indice de la qualité de l'air a atteint des niveaux effrayants, la barre des niveaux des niveaux de particules ultra fines dépassant 1000. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de ne pas dépasser 25 en moyenne journalière pour la santé.

Le brouillard polluant est très épais à New Delhi.
Le brouillard polluant est très épais à New Delhi. PRAKASH SINGH/AFP
Pourtant, New Delhi ou Pékin, connue aussi pour ses vagues de brouillard, ne figurent plus parmi les villes les plus polluées d'après le dernier rapport de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) publié en mai 2016. Ces deux mégapoles figurent respectivement à la 11e et 57e positions d'un palmarès de 3000 villes réparties dans 103 pays. Zabol en Iran, Gwalior et Allahabad en Inde occupent les trois premières places.
La pollution est un problème de santé publique majeur pour l'Inde. En 2015, la contamination atmosphérique, terrestre et aquatique était présumée responsable de 2,5 millions de décès dans ce pays, plus lourd bilan humain de la planète, a estimé une récente étude publiée dans la revue The Lancet. Des situations critiques qui mettent en question la durabilité des modes de vie humains dans des zones aussi peuplées.

Comments